Donnez au suivant

Publié le par Jean François Gagne

Peu de temps après la mort de Daniel, je devais retourner au bureau où j'ai travaillé pendant des années, l'entreprise a fermé en février dernier.  En arrivant, le valet du restaurant dans la même bâtisse m'offre ses condoléances.  Il ajoute que la propriétaire du restaurant vient tout juste, elle aussi, de perdre son fils.   Je vous avoue, je n'ai jamais été dîné à ce resto, mon budget ne me le permet pas.  J'en ai beaucoup entendu parlé, que la nourriture est excellente, et j'ai vu un tas de vedettes venir y savourer un repas.

Je suis avec ma douce, et je lui dit instinctivement qu'il faut que j'aille lui offrir mes sympathies.  S'il y a une chose que plusieurs membres de ma famille ont bénéficié, ce sont les messages de sympathies de gens dans ce blog, leur partage de notre souffrance, et leurs bons voeux.

En arrivant dans ce resto, l'ambiance est froide.   Une mouche aurait brisé ce silence.  Je demande au barman pour voir la proprio, il me dit qu'elle est dans la cuisine, en ajoutant: "parles-tu italien?"  Stupéfait, je répond par la négative.  Il m'avise qu'elle ne parle et comprend que l'italien.

Je ravale, je m'avance vers la cuisine.  Annie demeure en retrait derrière moi, dans la salle à manger.  J'observe la dizaine de personnes dans la cuisine, et je l'aperçois.  Elle a les yeux boursouflés, le visage rougeâtre.  Oh, je viens en 2 secondes de revoir un tas d'émotions.  Je m'avance tout doucement, un autre employé me demande s'il peut m'aider.  Je lui explique, les mains jointent, avoir aussi perdu un être cher la semaine précédente, et que je viens ici lui offrir mes sympathies et un soupçon de réconfort.  Elle s'approche devant moi, de toute vraisemblance intriguée.  L'employé lui traduit mes condoléances.  Ses yeux s'ouvrent tout grand un instant, et elle se penche et se laisse  tomber dans mes bras.  Elle m'exprime au rhytme de mille mots à la minute en italien, sans que je puisse comprendre quoi que ce soit.

Elle m'a ensuite pris le visage de ses mains, en me disant un tas d'autres choses, sans plus comprendre.  J'ai répondu en serrant la main droite et tappant de trois petits coups sur mon coeur.  Elle a hoché en ajoutant d'autres gentillesses, que j'aurais bien aimé saisir.

Elle m a offert en geste le repas, toutefois j'avais des travaux à compléter dans mon ancien bureau, j'ai décliné poliment.  Je savais à cet instant comment ça lui a fait du bien.  Je n'avais pas lu les commentaires ici encore, mais seulement de savoir que des gens avaient écrit - c'était une petite douceur au coeur.  

En quittant, un employé m'a lancé un "MERCI!", en ajoutant que ça lui avait fait un grand bien.  La sympathie, la générosité, s'expriment dans un language universel. 

Tout comme Daniel, je venais de donner au suivant. 

Une fois de plus, cet enfant m'aura fait grandir, découvrir de bien belles choses, de belles émotions, même après son grand départ.  Je t'Aime, mon Grand!

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S
Je viens de lire votre texte; j'ai des larmes qui me coulent dans le cou... Ce que vous venez de raconter me rappelle quelque chose que j'ai vécu il y a plusieurs années: oui, on peut se comprendre par le biais de nos expériences, sans même avoir besoin de parler la même langue. Votre geste a dû faire énormément de bien à cette dame...<br /> Bon Courage à toute votre famille!
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L
bonjour, en lisant votre article vous m'avez fait pleurer, moi qui ne m'emeut pas tant que ça!<br /> Il est vrai que le language du coeur n' a pas de barrières, et ce que je comprends, c'est que vous aussi souffrez beaucoup, je trouve déjà généreux de votre part d'avoir fait un blog pour qu'on puisse consoler la maman de Daniel, ce à quoi j'ai voulu participer car la souffrance j'en connais un bout, et on est jamais de trop pour apporter ne serait-ce qu'un mot d'amitié, mais dans tout ça je me rends compte que vous aussi  êtes bien malheureux!<br /> Alors tenez bon car je sais que ce n'est pas facile, mais vous avez déjà compris beaucoup de choses et que de ce mauvais coup du sort vous vous en sortirez grandi et surtout pas refermé sur vous même.<br /> Il faut réussir a transformer ses malheurs en leçons de vie, ce qui est extrêmement compliqué, et en fait un combat de chaque jour!<br /> En ayant de la force en vous , vous la communiquerez autour de vous!<br /> Bon courage, je viens de temps en temps prendre des nouvelles à travers votre blog!<br /> Lucie
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G
Bravo du fond du coeur. C'est toujours ces épreuves difficiles qui font ressurgir de chez l'humain sa plus grande force... l'amour et la compassion. Bravo Jean-François. Daniel est fier de toi.<br />  
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